Tony Soulié
Un jour de 1995 je frappai à la porte de l’atelier de Tony Soulié, un peu intimidé à l’idée de rencontrer un artiste déjà célèbre, et dont la renommée dépassait largement les frontières sur les cimaises du monde entier. Celui-ci très souriant et sympathique me mit à l’aise tout de suite par sa gentillesse et son attention à mon écoute : cette année-là je me lançais dans la diffusion d’estampes d’artistes contemporains. L’objet de ma visite était le convaincre de faire partie de ma sélection d’artistes, à mon grand plaisir il accepta. Ce partenariat dura 20 ans durant lesquels je diffusais ses estampes, en France et en Europe auprès de professionnels, principalement des galeries d’art et des artothèques. Je lui dois beaucoup, son nom et sa notoriété m’ont ouvert des portes. Depuis j’ai aussi exposé son travail sur les murs de la galerie, peintures/photos et estampes.
Tony Soulié est un globe-trotteur, joli mot dynamique pour désigner une personne qui parcourt la planète du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest, « il n’a pas choisi entre Ulysse et Icare » précise Anita Castiel (France Culture). Tony a arpenté tous les continents, souvent plusieurs fois, des grandes plaines américaines aux pistes rouges de la savane africaine, en passant par les buildings des mégapoles asiatiques, des îles enchantées et des territoires immaculés, et bien d’autres contrées inconnues pour la plupart d’entre nous. Tous ces voyages sont circonstances idéales pour découvrir les peuples et leur culture : l’homme tisse des liens d’amitié au gré de ses périples itératifs avec les indiens Zuni d’Arizona, notamment. Et l’artiste met aussi à profit ces immersions récidivistes pour s’imprégner et retranscrire dans son oeuvre ses tribulations multicolores. Une sorte de carnet de voyages protéiforme et bigarré à l’échelle de la planète, opus épais aux pages innombrables. Pour ce faire il dessine, il photographie beaucoup (principalement en noir et blanc), à l’occasion il réalise sur place des installations éphémères façon « Land Art », sur la pente d’un volcan par exemple. Il peint aussi bien sûr, très prolixe dans ce domaine, mais cette partie-là est réalisée plutôt dans son atelier parisien. Eclectique par nature il a également façonné toute une série de sculptures en verre, entouré des maîtres en la matière, les verriers de Murano. Très attaché à la notion d’accessibilité à l’art, Tony réalise depuis longtemps et régulièrement des multiples. Toutes estampes aux techniques variées telle la lithographie, la sérigraphie, la xylographie, l’aquatinte et l’eau-forte, et l’héliogravure pour les transferts photo. D’une façon générale Tony est un artiste qui aime emprunter de nouveaux sentiers picturaux et techniques, son iconographie est ample et généreuse, figurative ou abstraite ou dans un entre-deux, conceptuelle et poétique. Poète en images comme dans les mots Tony aime les fleurs, qu’il décline en « Flowers » depuis de longues années, voici les paroles de son ami l’écrivain Patrick Granville qui le décrit comme un « frère cosmique » : « Tony Soulié ne peint pas les fleurs mais un fantôme de fleur (…)
Il ne s’agit pas de figurer une fleur mais de déployer un potentiel infini de figurabilité ».
Tony Soulié est né en 1955, il vit et travaille à Paris, et dans le Monde. Jeune étudiant à peine sorti de l’ Ecole Des Arts Appliqués, Tony part à New-York lieu de bouillonnement culturel » underground ». Il y installera un atelier, la ville mythique influence durablement son travail, et à la Factory créée par Andy Warhol il rencontre le génial feu-follet Jean-Michel Basquiat. Plus tard en Floride il croisera le chemin de Robert Rauschenberg, un des maitres du Pop Art, un mouvement artistique qui influencera le travail du jeune artiste français, comme par
exemple l’usage de couleurs « flashy » ou la répétition de certains motifs. Première exposition en 1976, et depuis incalculables tout autour de la planète, de Hawaï à Tokyo, de Belgrade à Séoul, de Tel-Aviv à Montevideo, de Santa-Cruz à Camberra, et bien d’autres encore. Ses oeuvres sont présentes dans de très nombreuses collections publiques, de Lons le Saunier à Honolulu en passant par le Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, et la Bibliothèque Nationale de France. Dans le patrimoine des entreprises aussi, Airbus Industrie, Longchamp, Caisse des Dépôts et Consignations, Maersk ou Fondation Rothschild, etcetera. Partenariat avec de nombreux écrivains, dont J.M.G. Le Clézio Prix Nobel de Littérature, multitude d’ouvrages, livres d’art et catalogues, bibliophilie pléthorique !
JDS